« Briser les mythes autour du handicap : vers une société inclusive et respectueuse des différences »

Une salle comble, des visages attentifs, et un sujet brûlant d’actualité : « BRISER LES MYTHES SUR LES PERSONNES VIVANT AVEC DES BESOINS SPECIFIQUES ». Tel était le thème central de la conférence organisée par l’association Au-delà des frontières, réunissant experts, parents, et acteurs sociaux à Douala. Cette rencontre, riche en échanges, a permis d’explorer les préjugés profondément ancrés dans nos sociétés et de proposer des pistes d’action concrètes. Mais au-delà des mots, quelles réalités et solutions émergent vraiment ?
Les mythes : Racines profondes et impact dévastateur
Les intervenants ont d’abord dressé un tableau des mythes les plus courants.
Le mythe de la maladie : Une croyance persistante qui associe le handicap à une malédiction ou à une maladie incurable, souvent perçue comme une « punition divine« .
Le mythe de la dépendance : L’idée, erronée mais répandue, que les personnes vivant avec un handicap ne peuvent être autonomes ou productives.
Le mythe de la faute parentale : Une stigmatisation des parents, accusés de « ne pas avoir bien fait quelque chose » ou d’avoir « violé une règle sacrée« .
Le mythe de la guérison miraculeuse : Une quête aveugle de solutions impossibles qui retarde souvent l’accès à des soins adaptés.

Ces croyances, comme l’a souligné le psychologue clinicien intervenant, ne sont pas neutres : elles alimentent des mécanismes d’exclusion sociale, des ruptures familiales et, pire, un rejet de l’individu porteur de différence.
Des réalités inquiétantes : Manque de structures et coût des soins
Les témoignages des parents présents ont mis en lumière des réalités difficiles. Entre un manque criant d’infrastructures adaptées et des coûts exorbitants pour l’éducation spécialisée, beaucoup se sentent démunis. « Former un enfant avec des besoins spécifiques coûte plus d’un million par an, et encore, ce n’est pas suffisant« , a partagé un père visiblement ému.
Les experts ont également relevé le rôle crucial des politiques publiques. Si des lois existent au Cameroun pour protéger les droits des personnes handicapées, leur mise en œuvre reste insuffisante. « Sans volonté politique forte, nous restons au stade des discours« , a martelé une représentante du ministère des Affaires sociales Mme Ngassi Augustine.

Des solutions en discussion : entre théorie et pratique
Si le constat est sombre, des pistes d’action ont émergé des débats :
Former les enseignants à l’inclusion et à la gestion des élèves neurodivergents.
Sensibiliser les familles et les communautés pour briser les stéréotypes.
Créer des espaces de répit pour les parents.
Offrir un soutien psychologique et des formations adaptées.
Identifier et développer les compétences des personnes avec des besoins spécifiques.
Encourager leur insertion professionnelle pour contrer le mythe de la dépendance.
Renforcer l’application des textes de loi existants.
Investir dans la formation de spécialistes : ergothérapeutes, orthophonistes, éducateurs spécialisés.
Un questionnement critique : où va-t-on vraiment ?
L’enthousiasme des intervenants et des participants était palpable. Mais peut-on espérer des changements concrets ? Une participante a soulevé une question cruciale : « Comment créer des infrastructures inclusives si la plupart des familles peinent déjà à joindre les deux bouts ?«
De même, le psychologue thérapeute Guy Bertrand Tengpe, a insisté sur l’importance de l’action communautaire : « Les mentalités changent à travers l’éducation, pas par la contrainte. Mais qui éduque, et avec quels moyens ? » Ces interrogations, bien que laissées ouvertes, montrent que la route est encore longue.

Une société inclusive, un défi collectif
Cette conférence a permis de poser des bases solides pour déconstruire les mythes autour du handicap. Mais elle a aussi révélé l’ampleur du chemin à parcourir. Plus qu’un défi individuel ou familial, l’inclusion est une responsabilité collective. Comme l’a si bien résumé un intervenant : « Accepter nos différences, c’est construire une société où chacun a sa place.«
Alors, quelle sera la prochaine étape ? Passer des mots à l’action reste la clé.

Max MBAKOP