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[Réflexion Par Maître Roland Abeng] Projet d’Acquisition Guinness CAMEROON par la SABC Impunité et Mort-né !

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Le mot « IMPUNITÉ » est le seul qui me vienne à l’esprit en ce moment alors que j’essaie de réfléchir à la nouvelle qui a éclaté en fin de semaine dernière concernant l’offre par laquelle la plus grande brasserie camerounaise, la Société Anonyme les Brasseries du Cameroun (SABC SA ), détenue par le groupe français CASTEL, s’est entendue avec Guinness Cameroon SA (détenue par le groupe britannique DIAGEO), pour une prise de contrôle complète de 100 % des actions de cette dernière dans le cadre d’une transaction dont l’issue verra SABC contrôler environ 90 % du capital l’activité brassicole au Cameroun, si l’on se fie aux données actuelles indiquant que SABC SA contrôle actuellement 75% et Guinness Cameroun en contrôle 15%.

Le fait que ces deux entités, connaissant parfaitement les législations anticoncurrentielles camerounaise et CEMAC, visant à encourager la concurrence en limitant le pouvoir de marché de toute entreprise aient pu oser, un tel projet en dit long sur leur perception des juridictions dans lesquelles elles opèrent. PROBABLEMENT QUE LE CAMEROUN EST UNE REPUBLIQUE OU UNE JURIDICTION BANANIERE? Probablement pas. Les textes applicables ont été élaborés pour s’assurer que les fusions et acquisitions ne concentrent pas excessivement le pouvoir de marché ou ne forment pas de monopoles, ainsi que ainsi que le démantèlement des entreprises qui sont devenues des monopoles. Si la SABC SA n’est pas à ce stade, un quasi-monopole avec une part de marché de 75%, le rachat de Guinness Cameroon en fait bien évidemment un.

 Que dit la loi applicable à cet effet ? C’est Simple ! Il est interdit (globalement) de s’engager dans une opération de fusion ou d’acquisition qui aurait une incidence négative sur la liberté de choix des fournisseurs/clients, des consommateurs et limiterait par la même occasion, l’accès aux sources d’approvisionnement et/ou débouchés commerciaux. La loi fixe le seuil de la compétence de l’organisme de surveillance (le Conseil Communautaire de la Concurrence) de la CEMAC à un contrôle de 30 % du marché ou à un chiffre d’affaires annuel de 10 milliards de francs CFA. Cet organe de contrôle dans un délai de six (06) mois devrait décider d’approuver ou non l’opération et les parties à cette transaction sont certainement confiantes que le régulateur communautaire l’approuvera en dépit des circonstances juridiques, éthiques et factuelles flagrantes toutes fausses.

La raison de cette transaction telle que mentionnée dans le communiqué conjoint DIAGEO-CASTEL n’a rien à voir avec les difficultés économiques ou financières de la société cible Guinness Cameroon. Au Contraire Guinness Cameroon prospère dans une industrie brassicole camerounaise dynamique avec des bénéfices exceptionnels et une demande sans cesse croissante pour leurs produits. Le montant de la transaction l’atteste par lui-même.

 Parmi toutes les sociétés brassicoles du Cameroun et même de la CEMAC, Guinness Cameroon (malgré son nombre limité de marques) a été un véritable concurrent de la SABC, tout à l’avantage du consommateur camerounais. Nous sommes tous conscients des échecs de la SABC au fil des ans à reproduire ou à produire des produits similaires à Guinness ou Malta-Guinness. « Castel Milk Stout » et « Malt-up » en sont quelques-uns des produits dans lesquels la SABC regrette probablement de s’être aventurée, car ces produits SABC n’ont jamais prospéré sur le marché camerounais ! Cette acquisition envisagée mettrait certainement un terme à cette concurrence qui ne pouvait que profiter au consommateur camerounais, à l’Etat et au travailleur camerounais. Or, avec Guinness désormais dans le portefeuille/la poche de la SABC, nous ne devrions même plus nous attendre, à plus de créativité encore moins d’innovation de la part de SABC. Un consommateur a parlé de « trahison » de la part de Guinness et le consommateur n’a peut-être pas tout à fait tort.

 Alors, donnez-moi un meilleur mot que celui d’ « impunité » dans les circonstances où les deux entités décident de procéder à une telle transaction qui est mauvaise sur presque tous les fronts, et dont les effets négatifs sont perceptibles sur :

 · Main-d’œuvre/Effectifs (SABC reprendra 100% de Guinness Cameroun mais ne reprendra jamais 100% de ses employés et fournisseurs). Au moment où il faudrait encourager le plus grand nombre possible de nouveaux investisseurs dans le secteur, nous assistons plutôt à une collusion empêchant l’entrée de tels investisseurs.

 · La Concurrence (SABC détiendra environ 90 % du marché et imposera de telles règles). La concurrence devient dès lors asphyxiée. Cela aurait pour effet d’évincer d’autres concurrents, anéantissant ainsi la concurrence sur ce marché, toute chose qui aura une incidence négative sur la qualité des produits, des services et des prix à la consommation.

· Les consommateurs verront leur pouvoir de marché complètement réduit,

· La qualité du produit sera à la merci d’un seul producteur

 · Cette politique erronée, ne nourrit pas les ambitions économiques du Cameroun ni de la CEMAC. Le marché camerounais de la brasserie est très dynamique et compte des acteurs locaux et étrangers assez intéressants qui pourraient faire prospérer le secteur d’activités.

On nous informe dans le fameux communiqué conjoint que, la transaction a été soumise pour approbation réglementaire, aux autorités de la CEMAC. Personnellement, je ne doute pas de l’issue négative de cet approbation réglementaire pour les deux entités, mais je me pose tout de même la question de savoir pourquoi DIAGEO (qui est réputée pour ses pratiques commerciales équitables dans le monde entier), opterait plutôt pour la vente de sa filiale camerounaise au profit d’une entité avec une telle position dominante sur ce marché et qui au demeurant, n’a pas les mêmes standards commerciaux qu’elle? Je me demande surtout quels arguments les entités prendraient pour convaincre le Conseil Communautaire de la Concurrence de la CEMAC ?

Mon opinion reste juste le mien, mais qui sait si les responsables de l’autorisation réglementaire de la transaction (le Conseil Communautaire de la Concurrence), voient les choses sous ce même prisme ? Je prédis peut-être une mort pour le « bébé » en gestation, mais qui sait si un « bébé qui rebondit » naîtra dans les six prochains mois ? Qui sait si ceux qui conseillent les parties à la transaction n’ont pas été d’avis que cela se passerait sans anicroches ? On dit souvent que « si tu te fais une banane, les singes te mangeront ». Quelqu’un peut me confirmer que la visite annoncée du président français au Cameroun n’a rien à voir avec cela !

Barrister-Solicitor-Legal Consultant Council Member: Commonwealth Lawyers’ Association Board Member: AmCham-Cameroon Member: American Bar Association (Past Vice-Chair Anti-Corruption Committee) Country Head: Trace International-Cameroon

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